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La Reconnaissance

Sous la responsabilité de Frère Benoit, la Croix-Rouge sera appelée sur les lieux du charnier. Seize corps seulement seront identifiés sur l’instant. Celui de l’abbé Boursier n’en fait pas partie, pas plus que celui de l’abbé Larue. 88 cercueils renfermeront sans doute plus de corps que leur nombre. Il ressort des constatations que certaines victimes n’étaient pas mortes instantanément mais qu’elles ont été brûlées vives par l’essence et la dynamite. Laissons la conclusion à Frère Benoit :

« Le drame de Saint-Genis-Laval laissera toujours, à qui en a été le témoin, un sentiment inexprimable fait à la fois d’angoisse et de stupeur, devant tant de sadisme stupide. D’une horreur telle que Dante eut pu l’imaginer, le concevoir jamais.… Voila un ennemi traqué, poursuivi, affolé, qui sait que demain il sera à la merci de ses adversaires, qui devrait en toute bonne logique faire dans la mesure du possible oublier ce qui, déjà est trop cruel, et qui froidement, délibérément, avec un souci déconcertant de minutie, commet un crime qui ne sera dépassé dans son horreur qu’à Oradour-sur-Glane ». (Frère Benoit, La Croix-Rouge et le drame de Saint-Genis-Laval (C.H.S.G.M.) carton B9, p.4, A.D.R.).

L’Église

La reconnaissance de l’Action du Chanoine François Boursier arrivera très vite. Tout d’abord de la part de l’Église avec des cérémonies à Saint-Laurent-du-Pont (03/09/1944), à Grenoble (15/09/1944) et bien entendu à Villeurbanne où un service funèbre est organisé le 22 septembre 1944, présidée par Monseigneur Caillot. Le 12 novembre ce sera le cardinal Gerlier qui, au cours d’une cérémonie grandiose, la foule se massera jusque dans la rue où une sono est installée, en rendant hommage au Chanoine, bénira les cloches de l’église livrées quelques jours avant et que le Chanoine n’entendra jamais teinter. Le 17 juin 1945, un monument sera érigé en sa mémoire dans l’église sainte Thérèse. Une nouvelle fois la sono est installée dans la rue. La cérémonie, animée par les Petits Chanteurs à la Croix de Bois qui peuvent ainsi remercier le Chanoine de les avoir accueillis dans les moments difficiles, est de nouveau présidée par Mgr Caillot, Mgr Lavarenne prononcera l’Allocution que nous avons souvent citée dans ce document. Régulièrement les anniversaires donneront lieu à des cérémonies comme en 2014 où une semaine entière d’événements commémoreront les 70 ans de la mort du Chanoine. Enfin, en 2018 sera ouverte une requête en béatification portée par le cardinal Philippe Barbarin, requête actuellement en cours avec l’accord de la Conférence Plénière des Évêques de France (Lourdes 08 novembre 2018) et du Dicastère pour la Cause des Saints (Rome, mars2019).

Notons que, en 2017, l’ensemble des paroisses de Villeurbanne-Sud à décidé sur l’avis de ses paroissiens de donner à son regroupement le nom de :  « Ensemble Paroissial Chanoine Boursier »

La ville de Villeurbanne

Presque aussi rapide sera la reconnaissance de la ville de Villeurbanne. Le 28 octobre 1944, dans sa délibération, le Conseil Municipal à la suite de son maire communiste Camille Joly, décide de donner à la « place du marché du nouveau centre » le nom de « Place du Chanoine Boursier, 1878-1944, martyr de l’occupation allemande ». Il en sera de même à Saint Didier-au-Mont-d’Or qui débaptisera la place de l’église pour lui donner le nom du Chanoine et à Sainte-Geneviève-des-Bois où la place Sainte Geneviève deviendra la place de l’abbé Boursier (12/10/1944).

En Août 1984, Charles Hernu (Maire et Ministre des armées) initiera une cérémonie commémorative en l’honneur de François Boursier sur la Place Lazare Goujon. Enfin en septembre 2014, la municipalité sous la mandature de son maire, Jean-Paul Bret, ouvrira un dossier pour faire reconnaître par Yad Vachem (mémorial de la Shoah) le chanoine comme « juste devant les nations ». Conjointement à cette demande une plaque (avec QR code) sera apposée par la ville sur la place Chanoine Boursier en présence des autorités civile set religieuses.

Reconnaissance Nationale et Internationale

C’est d’abord de ses chefs qu’elle vint en premier, et quoi de plus normal. Nous avons vu que les premiers pas du Chanoine dans la Résistance se sont fait auprès de Georges Bidault dans le cadre de l’impression du « Bulletin de la France Combattante ». Dans son avant-propos au livre de Jean Louis Cremieux-Brilhac « les voix de la liberté – ici Londres » celui qui deviendra Président du Conseil National de la Résistance en juin 1944 avant de devenir Président du Conseil, tiendra à son encontre les propos suivants :« La bravoure de l’abbé Boursier, le suprême sacrifice que celui-ci a consenti est un cas exceptionnellement éloquent de l’accomplissement et même de l’existence d’un tel devoir. J’aurais sûrement moi-même manqué à mon propre devoir et aux exigences de ma fonction en omettant de signaler l’héroïque mémoire de ce prêtre qui fut un grand français. ».

Autre hommage qui ne peut souffrir aucune contestation est la citation trouvée dans le Discours de réception d’Edouard Herriot à l’Académie Française. Succédant au Cardinal Baudrillard il cite quelques ecclésiastiques ayant participé à la renaissance de leur patrie : « …On ne saurait les citer tous. Ceux-ci accompagnent leurs frères du maquis… Tout près de la ville à laquelle j’appartiens l’abbé François Larue, commandant d’un bataillon de chasseurs, membre de l’armée secrète, incarcéré au fort de Montluc, est assassiné dans l’affreuse tuerie de Saint-Genis-Laval. J’en veux saluer un autre, le chanoine François Boursier, mobilisé dans une division alpine, puis engagé dans la Résistance. On le presse de se mettre à l’abri ; il refuse de s’éloigner et prononce cette phrase sublime : « Il faut qu’il y ait des prêtres dans les geôles ». Ses camarades de prison disaient de lui : « C’est le Christ parmi nous ». On le vit revenir sanglant des chambres de torture, où on l’avait à la fois flagellé et injurié, avant qu’il ne fut, lui aussi, massacré sur une colline qui demeure pour tous les patriotes un haut lieu. Dans le drame récent, l’Église de France a eu, elle aussi ses martyrs, devant lesquels s’inclinent toutes opinions confondues, ceux qui ont eu l’honneur de souffrir, plus ou moins, pour le pays ».

Plus officiellement François Boursier sera promu le 27/07/1946 dans l’ordre National de la Légion d’Honneur au grade de chevalier à titre posthume et cité à l’ordre de l’Armée un an plus tard le 27/07/1947.

La mémoire des 120 massacrés du Fort-Lorette est rappelée chaque année dans la ville de Saint-Genis-Laval où un Mémorial a été inauguré le 28/09/1947.

Enfin, et cela n’est pas le moins étonnant, le Chanoine François Boursier a été, par ordre du Roi d’Angleterre, le 19 janvier 1948, inscrit dans les archives royales avec la mention suivante : « By the KING’S Order the name of Monsieur François Boursier, was placed on record on 19 january 1948, as commended for brave conduct. I am charged to express His Majesty’s high appreciation of the service rendered ». Signé Prime Minister and First Lord of the Treassury – C.R. Attle. ( premier Ministre du Royame Uni de 1945 à 1951)

Un Mémoire de Maîtrise d’Histoire intitulé « François Boursier (1878-1944) Un prêtre de combat, Curé de Villeurbanne, Bâtisseur et « Apôtre de l’idée de Résistance »  a été soutenu en 1991 par Alain Moreau, historien. Il représente une somme importante de renseignements dont cet article s’est en grande partie inspiré. (« François Boursier (1878-1944) Un prêtre de combat, Curé de Villeurbanne, Bâtisseur et « Apôtre de l’idée de Résistance » » – Mémoire de maîtrise d’histoire sous la direction de M. Jean-Dominique Durand Université Jean Moulin – Lyon III – Faculté des lettres et civilisations U.E.R. d’histoire et Géographie – année 1990 – 1991. 516 p.)

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